T'as prévu de t’pointer avant l’heure histoire de procéder à une vérification préalable. Tu voudrais pas qu’un clodo ou un tagueur traîne dans l’coin et vous interrompe en pleine exploration –ou plutôt, t’interrompe en pleine mission commando de drague pas subtile-. Mais en fait, tu sais même pas si ta proie va s’montrer étant donné ta façon de procéder : un mot doux sous la porte. T’aimes bien faire ce genre de trucs débiles, et tu t’es dit que parier sur sa curiosité serait plus efficace que lui filer un coup de téléphone pour récolter une excuse bidon –même s’il va capter par la même occasion que t’es allé chercher son adresse quelque part et qu’il va sans doute trouver ça vraiment flippant-. Le truc chiant c’est que ta chaîne de vélo s’enraye avant d’arriver aux entrepôts abandonnés, et que t’es obligé de le traîner sur les derniers kilomètres en craignant de voir ton offensive réduite à néant. Parce qu'il risquerait de se barrer en ne voyant personne, et ça c'est clairement non-envisageable. Du coup t'accélères le pas, tu cours même, pour arriver le premier au rendez-vous. Parfait. Tu poses ton vieux deux-roues derrière des escaliers délabrés, relevant le nez quand tes oreilles perçoivent des bruits de pas. Timing de malade. Et tu l’mates planqué sous les marches pendant qu'il étudie le lieu en menaçant de faire demi-tour, approchant à sur la pointe des pieds alors qu’il s’apprête à rebrousser chemin. Wow, pas si vite mon mignon. Tu te colles dans son dos -ouais, t'en profites un peu-, glisses la paume de ta main droite sur ses lèvres pour le faire taire et approches ton visage de son oreille. « File-moi ton oseille ou j’te plombe la cervelle. » Tu souffles d’un ton agressif en pointant ton index et ton majeur contre sa tempe, laissant une courte seconde s’écouler avant de le libérer de ton étreinte et de te marrer comme un bouffon. Tu recules alors de quelques pas, attendant qu’il se tourne vers toi. Tu ne laisses pas ta petite blague durer trop longtemps, parce que tu te dis que s’il maîtrise un art martial tu risques de te faire démolir. Ce serait con, ton beau petit plan d’attaque s’envolerait aussitôt et tu devrais recommencer ta danse du paon après ton rétablissement. Quoiqu’au pire, tu pourras toujours gémir en feignant une douleur vive histoire de t’faire dorloter un peu –il n’est pas censé savoir que tu peux te couper un doigt sans éprouver le moindre frisson-. « Ouais c’est qu’moi en fait, t’as pas rancard avec une belle poulette aux longues jambes désolé. » Tu sais pas trop où il se situe le mec, t’es pas du genre à faire une enquête de terrain avant de te jeter dans la gueule du loup, sauf cas exceptionnellement complexe. De toute façon c’est pas ce genre de détail qui t’arrêterais, ce serait pas le premier adorateur de paire de seins que t’attraperais dans tes filets. Mais puisque t’as la possibilité de tâtonner un peu, t’espères bien qu’il va laisser échapper un mot, un regard gêné ou un geste qui le trahira, qui signifiera qu’il n’aurait pas préféré une belle poulette aux longues jambes.  « T’es toujours ok pour les conseils ? » Tu l’interroges pour lui faire comprendre où tu veux en venir avec cette rencontre secrète, attrapant l’appareil photo suspendu à ton épaule pour l’agiter devant ton nez. Bon ce n’est pas vraiment comme s’il t’avait donné son accord la dernière fois, t’avais un peu fait la majorité de la conversation et le pauvre gars n’avait rien promis. Mais même s’il t’avais dit ‘va t’faire foutre’, t’aurais pris ça pour un oui. « Cet endroit appartient à mon père, il compte le rénover et j’me suis dit que ce serait dommage de pas en profiter avant. » MYTHO. Mais t’en profites pour le rassurer quant à la légalité de la petite escapade dans laquelle t’as l’intention de l’entraîner, parce que tu sais pas s'il est du genre aventureux et t'as peur que ça l'arrête. Alors qu’en fait, les flics peuvent débarquer à tout moment et vous traîner au commissariat s’ils sont mal lunés. « T'en dis quoi ? »Tu lèves un sourcil, provocateur, lui décochant ton sourire de mec à qui tu peux rien refuser.